Le 10 août 2018, la loi pour un Etat au service d’une société de confiance a été mise en place afin de simplifier les rapports entre l’administration et les citoyens, en facilitant notamment les démarches des administrés. Elle consacre ainsi, dans sa mesure phare qu’est le droit à l’erreur, la possibilité pour les particuliers comme les entreprises de se tromper dans leurs déclarations auprès de l’administration, sous réserve toutefois de respecter quelques conditions.
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Qu’est-ce que le droit à l’erreur ?
La loi n° 2018-727 du 10 août 2018 crée toute une série de droits pour les entreprises et les personnes privées, afin de faciliter leurs rapports avec l’administration. Le droit à l’erreur a ainsi été inséré au sein du Code des Relations entre le Public et l’Administration (CRPA) et s’applique aujourd’hui à toute personne qui aurait méconnu pour la première fois une règle applicable à sa situation. En réalité, il s’agit davantage d’un droit à la régularisation. Ainsi, le nouvel article L.123-1 du CRPA prévoit que l’administration ne peut pas infliger une sanction à une personne ayant méconnu pour la première fois une règle applicable à sa situation, ou ayant commis une erreur matérielle lors du renseignement de sa situation, dès lors qu’elle a régularisé sa situation soit de sa propre initiative, soit après avoir été invitée à le faire par l’administration, dans le délai que celle-ci lui a indiqué. Il est à noter que seules les erreurs régularisables sont concernées. En conséquence, les retards ou omissions de déclaration dans les délais prescrits par un texte, parce qu’elles ne sont pas régularisables, n’entrent pas dans le champ d’application du droit à l’erreur.
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La condition de bonne foi
Le droit à l’erreur ne s’applique, comme son nom l’indique, en cas d’erreur, par définition commise par inadvertance ou par première méconnaissance involontaire d’une règle. En d’autres termes, il ne s’applique qu’en cas de bonne foi de l’administré, excluant ainsi les erreurs répétées ou les tentatives de fraude. Il en va de même d’après l’étude d’impact du projet de loi pour les erreurs « grossières » ou les erreurs qui témoignent d’une négligence rare, qui ne peuvent par nature, pas être commises de bonne foi et qui sont donc exclues du champ d’application du droit à l’erreur.
En conséquence, en cas de mauvaise foi, l’administration pourra prononcer la sanction initialement prévue par la loi, sans avoir à inviter l’administré à régulariser sa situation. (CRPA, Art. L.123-1).
Le nouvel article L.123-2 du CRPA prévoit en outre à cet égard que la mauvaise foi est caractérisée par la méconnaissance délibérée par une personne d’une règle applicable à sa situation, et que la preuve de cette mauvaise foi doit incomber à l’administration.
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Les cas d’exclusion du droit à l’erreur
La loi elle-même prévoit un certain nombre d’exclusions du champ d’application du droit à l’erreur, désormais énumérées à l’article L.123-1 du CRPA. Sont dès lors exclues du droit à l’erreur :
→ Les sanctions requises pour la mise en œuvre du Droit de l’Union Européenne ;
→ Les sanctions prononcées en cas de méconnaissance des règles préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l’environnement ; Les sanctions prévues par un contrat ; Les sanctions prononcées par les autorités de régulation à l’égard des professionnels soumis à leur contrôle.
→ En outre, le droit à l’erreur ne s’applique pas lorsque des obligations résultant d’une convention internationale s’y opposent. Par ailleurs, certaines exclusions existent aussi du fait du caractère supplétif du droit à l’erreur, qui s’applique, conformément à l’article L.100-1 du CRPA par définition sous réserve des dispositions législatives ou réglementaires organisant une procédure spéciale de régularisation des erreurs commises.
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L’instauration d’un droit au contrôle
La loi reconnait à tout usager, en parallèle du droit à l’erreur, le droit de bénéficier, à sa demande, de contrôles administratifs afin d’obtenir la validation de ses pratiques ou de les corriger.
Ainsi toute personne, qu’elle soit une entreprise ou une personne privée, peut dorénavant demander elle-même à faire l’objet d’un contrôle, en précisant les points sur lesquels le contrôle est sollicité. (CRPA, Art. L.124-1).
Une fois le contrôle demandé, l’administration se devra de l’effectuer dans un « délai raisonnable », dont la durée n’est pas précisée par les textes. En revanche, l’exposé des motifs indique que ce délai est apprécié par l’administration concernée au regard du contenu de chaque demande et des moyens dont elle dispose pour y faire droit. L’étude d’impact ajoute par ailleurs qu’il ne devrait pas, en principe, conduire l’administration à différer au-delà d’une année la réalisation du contrôle demandé.
Par ailleurs, il est de principe que « silence vaut acceptation », en conséquence le silence gardé par l’administration pendant 2 mois sur une demande de contrôle vaudra décision implicite d’acceptation.
En ce qui concerne l’opposabilité du résultat de ce contrôle et du droit à régularisation, sous réserve des droits des tiers, le résultat du contrôle peut être opposé à l’administration dont il émane. Cependant, cette opposabilité cesse d’être applicable en cas de changement de circonstances de droit ou de fait qui serait de nature à affecter les conclusions du contrôle, ou si l’administration procède à un nouveau contrôle donnant lieu à de nouvelles conclusions expresses. (CRPA, Art. L.124-2).
Il faut savoir par ailleurs que l’opposabilité de ce contrôle ne peut en aucun cas faire obstacle à l’application des dispositions législatives ou réglementaires préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l’environnement. Elle s’exerce en outre sous réserve des conventions internationales.
Enfin, si le contrôle débouche sur un constat d’irrégularité, la personne concernée pourra, si elle en remplit les conditions, régulariser sa situation dans le cadre du droit à l’erreur.
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Les cas d’exclusion du droit au contrôle
Comme pour les cas d’exclusion du droit à l’erreur, ceux du droit au contrôle proviennent soit directement de la loi, soit en raison du caractère supplétif du droit au contrôle.
Tout d’abord, en application de l’article L.124-1 du CRPA, les services administratifs ne sont pas tenus de donner suite aux demandes abusives ou aux demandes qui ont manifestement pour effet de compromettre le bon fonctionnement du service, ou de mettre l’administration dans l’impossibilité matérielle de mener à bien son programme de contrôle.
Par ailleurs, comme le droit à l’erreur, le droit au contrôle a un caractère supplétif et a donc vocation à s’appliquer sous réserve de dispositions spécifiques organisant des procédures de droit au contrôle équivalentes dans des secteurs déterminés.
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L’assouplissement des sanctions
Dans le cadre de manquements à certaines règles de droit du travail, cette loi offre la possibilité pour le DIRECCTE (Directeur Régional des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi), sur rapport de l’agent de contrôle de l’inspection du travail, de prononcer certaines amendes administratives. (C. Trav., Art. L.8115-1).
La loi du 10 août 2018 prévoit à cet égard une alternative à l’amende administrative en autorisant le DIRECCTE à donner à l’employeur un simple avertissement. Pour déterminer si elle prononcera une amende ou un avertissement, l’autorité administrative devra prendre en compte les circonstances et la gravité du manquement, le comportement de son auteur, et notamment sa bonne foi. Comme l’amende, l’avertissement pourra être contesté devant le Tribunal administratif.
L’amende pour sa part est plafonnée à 4.000 € et appliquée autant de fois qu’il y a de salariés concernés par le manquement (8.000 € en cas de nouveau manquement de même nature dans les deux ans. Depuis le 12 septembre 2018, ce plafond est majoré à 50% en cas de nouveau manquement constatée dans l’année suivant un avertissement concernant un précédent manquement de même nature.
Enfin, comme s’y était engagé le gouvernement, la loi supprime la sanction pénale spécifique encourue par les employeurs en cas de non-respect de l’obligation de secret professionnel dans la mise en œuvre du prélèvement à la source